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Le fin mot de l'écrit
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Le fin mot de l'écrit
23 janvier 2008

Gynéïde

Illico texto, pareille à un hologramme impavide, elle s’adresse par le menu au quidam d’outre-écran, devise de justesse avec ses sosies devant des micros et, comme personne, se cantonne au vide des numéros de téléphone qu’elle compose à cran. Nonobstant les répondeurs, rien ne l’écoute rien ne l’entend ; inaudible presque, elle reste ainsi en veilleuse des heures durant, face à untel, face à elle-même.

Désincarnée, elle se prénomme Gynéïde.

Crescendo, plus émission qu’émotion en vérité, elle appuie inlassable sur des boutons pour abréger toujours ses maux ineffables, ses différends mêlés à des unités. Elle transmet machinale des lettres de fortune, à fins de formater nom et identité et met aussi un terme par touches digitales à son imaginerie, à un verbiage cursif alors elle se résume, pour en venir au faîte de sa messagerie.

Déshumanisée, elle se sous nomme Gynéïde.

SOS mémento, tous ses livres idylliques bradés contre des bribes de mémoire, elle s’en sort quand même défragmentée, repliée sur l’oubli, en vue de maintenir un support quantitatif de liaisons sans histoire, sauvegardées seulement à force de données synthétiques. Par pulsation, elle garde ainsi à cœur de tenir maints contacts sous tension, dans un automatisme, loin des bugs affectifs.

Désaffectée, elle se dénomme Gynéïde.

Fiasco, portraits d’album copiés collés dans des fichiers, clichés subtilisés à des séries télédiffusées, elle feint des sentiments qu’elle programme plus qu’elle n’aime et se fourvoie croyant être vraie, hors connexion du cercle des vivants. Malgré sa résolution, le déclic ne s’insère pas, entité dénuée de fantaisie, pauvre même de conviction, pièce détachée du circuit, entre elle et la vie nulle alternative, nulle illusion, le courant ne passe pas.

Désintégrée, elle se nomme Gynéïde.

L’espace
de quelques lignes, j’ai perdu qui je suis, privée soudain d’essence, j’ai endossé une impersonnalité et, un instant Gynéïde, j’ai déposé ici un texte sans âme…


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Commentaires
C
Quelle justesse et quelle finesse dans les mots pour traduire ce piège de l'Internet ! Chapeau !
A
Bravo Flaneuse ! Tu transcris très bien le vide virtuel dans lequel on peut se perdre sans y prendre garde.<br /> Oui, bravo !
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